contentions, expansions, fioritures et ornements

Exposition 2012

Préface

Tout l’art de Frédérique Fleury exprime cette idée qu’elle a vécu pour le vivre, encore et “en corps” vigoureusement. Elle investit le champ de l’art avec le souci d’éliminer toute conformité à une ligne, à une généalogie ou à un système. Elle crée son propre champ. Une visite dans l’atelier, lieu mystère d’une intense activité devinée donne tout aussi bien l’idée de tension et de plaisir. Un organisme avec ses couleurs, odeurs, bruits, chez elle ça palpite et même au repos, son oeuvre frémit incessamment. Elle s’est inventée un « statut » ouvert à tous les risques de la pensée et du faire. Pour Frédérique Fleury la peinture n’est pas enfermée dans un dogme. Elle va avec la vie, ses doutes et ses contradictions. Il faut de « l’imagination pour être à la fois artiste, femme et mère » cette formule pourrait être sienne.

C’est un contrat entre l’art et la vie construit autour d’une oeuvre puissante presque virile. Toute oeuvre recèle sans doute une part l’autobiographie. Elle a persévéré avec entêtement pour livrer cette part d’elle-même où “peindre” est un mode d’expérience de soi et jamais elle n’a paru découragée. Elle a de quoi répondre, par sa pratique et le plaisir qu’elle y prend. J’ai toujours été frappée par son inlassable curiosité et son étonnante vitalité à passer d’un objet imaginé à l’objet réalisé, ce jeu d’aller et retour qui donne à son travail une lecture inhabituelle.

Surtout il y a la couleur, en tout cas elle est de la noce et nous sommes invités à monter à bord de cette oeuvre prolifique (du monumental au plus petit format) du jaune, du orange, du violet, du bleu, des ocres. Pour Frédérique Fleury quantité et qualité ne sont pas incompatibles. Elle façonne et contamine l’espace de la toile, de l’objet ou de la sculpture avec délectation, tout cela orchestré pour brouiller les frontières. Avec habileté, elle souligne la diversité visuelle et matérielle du tableau comme s’il parlait toutes les langues.

De ses incursions dans l’univers de la peinture, de la sculpture, de la céramique où la hiérarchie des genres n’a plus court, elle crée un territoire personnel du sensible, une oeuvre qui déconcerte où la présence du matériau libère un cran dans la “luxuriance” avec toutes les sensations possibles. Restreindre son oeuvre à un seul domaine n’a pas de sens.

Les tableaux, les sculptures, reliefs, grands vases fonctionnent comme autant d »objet à “tâter” ou interroger dans leur prodigieuse accumulation de matière. Sa façon à elle d’être “fauve” dans la question de la forme, de l’expulsion de la couleur (ses mélanges avec le vernis, la colle dans les peintures de 1993) son goût pour tout un florilège de matière telle que le bois, le métal, le ciment, la pâte de verre, le miroir, les perles et paillettes, les pampilles, la porcelaine autant de manière de travailler l’épaisseur, la compilation, le collage, la superposition redoublés de griffures, hachures, découpes ou volumes “une petite usine à fabriquer” où peindre, dessiner, couper, installer, cuire ne sont jamais de trop.

Des gestes et des actions qu’elle maîtrise avec une notion de l’espace du tableau qui n’appartient qu’à elle. Abstraction, géométrie, forme saillante, mouvement, sa peinture fait surgir de l’ordre et du désordre. Attitude nécessaire pour aborder ce rythme incessant presque dansant et ça tourne bien.

“Fioriture et ornements” dit-elle dans le titre de son exposition, je n’en suis pas si sûre quand dans cette accumulation pour rompre avec la monotonie temporelle, je ne vois rien de trop ou qui relève du décoratif. Je perçois une oeuvre fabuleuse, ondulante et serpentine jouant des courbes, volutes comme un cirque qui arrive en ville avec fougue et générosité.

C’est juste vivant, ces créations heureuses ayant grandement étendu le domaine de l’art : tableau, relief, sculpture, mais aussi fresque, vase et urne, mosaïque. Il y a dans le travail de Frédérique Fleury “la couleur du toucher” qui relie ces oeuvres à l’unisson des sens dans une extrême émotion.

Les sculptures et reliefs en grès émaillé de 2010 ont retenu toute mon attention. Petites pièces de contemplation, raffinées, hérissées de cônes, de pointes comme destinées à un temple de l’âge d’or perdu. C’est comme ça, très jubilatoire, formes indéfinissables sans usage, mystère de la nature, ça tient debout, au mur et toujours ce “plaisircouleur”. Objets fétiches ou divinités hybrides, elles semblent en contacts avec des énergies vitales. On sent le toucher, la main, les doigts, la lumière qui effleure la matière. On sent aussi une sorte de rapidité, on y va vite et bien, “fa presto”.

Singulier et pluriel, son art résulte de cette conviction, de cette hardiesse qui vient du désir. Alors s’approcher davantage de cette oeuvre car “la joie

repose sur elle-même” (Marcelin Pleynet) Chaque fois que je rencontre Frédérique Fleury, je vois bien que tout ce qui l’intéresse c’est la vie. Elle n’a pas besoin de donner de preuve qu’elle est artiste.

Elisabeth Chambon
Conservateur du musée Géo-Charles
(Echirolles-Grenoble), juin 2012

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